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Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/371

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chapitre xxvi

Pherecydes Syrien præcepteur de Pythagoras, le poete Gregeoys Alcman, & aultres[1]) & preuoyant que à ſa mort les Iuifz feroient feu de ioye, feiſt en ſon Serrail de toutes les villes, bourguades, & chaſteaulx de Iudee tous les nobles & magiſtratz conuenir, ſoubs couleur & occaſion fraudulente de leurs vouloirs choſes d’importance communicquer pour le regime & tuition de la prouince. Iceulx venuz & comparens en perſones feiſt en l’hippodrome du Serrail reſerrer. Puys diſt à ſa ſœur Salomé, & à ſon mary Alexandre. Ie ſuys aſceuré que de ma mort les Iuifz ſe eſiouiront, mais ſi entendre voulez, & executer ce que vous diray, mes exeques ſeront honorables, & y ſera lamentation publicque. Sus l’inſtant que ſeray treſpaſſé, faictez par les archiers de ma guarde, es quelz i’en ay expreſſe commiſſion donné, tuer tous ces nobles & magiſtratz, qui ſont ceans reſerrez. Ainſi faiſans toute Iudee maulgré ſoy en deuil & lamentation ſera[2], & ſemblera es eſtrangiers, que ce ſoyt à cauſe de mon treſpas : comme ſi quelque ame Heroique feuſt decedee. Autant en affectoit vn deſeſperé tyrant, quand il diſt. Moy mourant la terre ſoyt auecques le feu meſlee, c’eſt à dire, periſſe tout le monde. Lequel mot Neron le truant changea diſant, moy viuent[3] : comme atteſte Suetone. Ceſte deteſtable parole, de laquelle parlent Cicero lib. 3. de Finibus. & Senecque lib. 2. de Clemence, eſt par Dion Nicæus, & Suidas[4] attribuee à l’empereur Tibere.



  1. Alcman, & autres. Voyez Pline, VII, 51, et XI, 33.
  2. En dueil & lamentation ſera. Josèphe, XVII, 8.
  3. Changea diſant, moy viuent. « Dicente quodam in sermone communi : Ἐμοῦ θανόντος γαῖα μιχθήτω πυρί, imo, inquit, ὲμοῦ ζῶντος. » (Suétone, Néron, 38)
  4. Dion Nicæus, & Suidas. Dion Cassius, Histoire romaine, liv. LVI ; Suidas, Vie de Tibère.