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Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/377

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chapitre xxviii

Palodes publier & dire que Pan le grand Dieu eſtoit mort.

Ceſte parolle entendue diſoyt Epitherſes tous les nauchiers & voyaigiers s’eſtre eſbahiz & grandement effrayez : Et entre eulx deliberans quel ſeroit meilleur ou taire ou publier ce que auoit eſté commandé, Diſt Thamous ſon aduis eſtre, aduenent que lors ilz euſſent vent en pouppe, paſſer oultre ſans mot dire : aduenent qu’il feuſt calme en mer, ſignifier ce qu’il auoit ouy. Quand doncques feurent pres Palodes aduint qu’ilz ne eurent ne vent ne courant. Adoncques Thamous montant en prore, & en terre proiectant ſa veue diſt ainſi que luy eſtoit commandé, que Pan le grand eſtoit mort. Il n’auoit encores acheué le dernier mot quand feurent entenduz grands ſouſpirs, grandes lamentations, & effroiz en terre, non d’vne perſone ſeule, mais de pluſieurs enſemble. Ceſte nouuelle (par ce que pluſieurs auoient eſté præſens) feuſt bien touſt diuulguee en Rome. Et enuoya Tibere Ceſar lors empereur en Rome querir ceſtuy Thamous. Et l’auoir entendu parler adiouſta foy à ſes parolles. Et ſe guementant es gens doctes qui pour lors eſtoient en ſa court & en Rome en bon nombre, qui eſtoit ceſtuy Pan, trouua par leur rapport qu’il auoit eſté filz de Mercure & de Penelope. Ainſi au parauant l’auoient eſcript Herodote[1] & Cicero on tiers liure de la nature des Dieux[2]. Toutesfoys ie le interpretoys de celluy grand Seruateur des fideles, qui feut en Iudee ignominieuſement occis par l’enuie & iniquité des Pontifes, docteurs, prebſtres, & moines de la loy Moſaicque. Et ne me ſemble l’interpretation abhorrente. Car à bon droict peut il eſtre en languaige Gregoys dict Pan. Veu que il eſt le noſtre Tout, tout ce que ſommes, tout ce que viuons, tout

  1. Herodote. Voyez liv. II, c. 145.
  2. On tiers liure de la nature des Dieux. Voyez c. 22.