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Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/405

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chapitre xxxvi

des ioyeulx pifres & tabours, des trompettes & clairons. Par la coniecture de ſoixante & dixhuict enſeignes qu’il y comptoit, eſtimions leur nombre n’eſtre moindre de quarante & deux mille. L’ordre qu’elles tenoient, leur fier marcher, & faces aſceurées nous faiſoient croire, que ce n’eſtoient Friquenelles : mais vieilles Andouilles de guerre. Par les premières fillieres iusques pres les enſeignes eſtoient toutes armees à hault appareil, auecques picques petites, comme nous ſembloit de loing, toutesfoys bien poinctues & aſſerees, ſus les aeſles eſtoient flancquegees d’vn grand nombre de Boudins ſyluaticques, de Guodiueaux maſſifz, & Saulciſſons à cheual, tous de belle taille, gens inſulaires, Bandouilliers, & Farouches.

Pantagruel feut en grand eſmoy, & non ſans cauſe : quoy que Epiſtemon luy remonſtraſt que l’vſance & couſtume du pays Andouillois pouoit eſtre ainſi chareſſer & en armes recepvoir leurs amis eſtrangiers : comme font les nobles roys de France par les bonnes villes du royaulme repceuz & ſaluez à leurs premières entrees apres leur ſacre, & nouuel aduenement à la couronne. Par aduenture, diſoit il, eſt ce la guarde ordinaire de la Royne du lieu, laquelle aduertie par les ieunes Andouilles du guet que veiſtes ſus l’arbre, comment en ce port ſurgeoit le beau & pompeux conuoy de vos vaiſſeaulx, a penſé que là doibuoit eſtre quelque riche & puiſſant Prince : & vient vous viſiter en perſone. De ce non ſatisfaict Pantagruel aſſembla ſon conſeil, pour ſommairement leurs aduis entendre ſus ce que faire debuoient en ceſtuy eſtris d’eſpoir incertain, & craincte euidente.

Adoncques briefuement leurs remonſtra comment telles manieres de recueil en armes auoit ſouuent