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Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/494

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le quart livre.

Inuentoit art & moyen de aneantir la greſle, ſupprimer les vens, deſtourner la tempeſte, en la maniere vſitee entre les Methanenſiens de Trezenie[1].

Aultre infortune eſt aduenu. Les pillars & briguans deſroboient Grain & Pain par les champs. Il inuenta l’art de baſtir villes, fortereſſes, & chaſteaulx pour le reſerrer & en ſceureté conſeruer. Eſt aduenu que par les champs ne trouuant Pain entendit qu’il eſtoit dedans les villes, fortereſſes, & chaſteaulx reſerré, & plus curieuſement par les habitans defendu & guardé, que ne feurent les pommes d’or des Heſperides par les dracons. Il inuenta art & moyen de baſtre & deſmolir fortereſſes & chaſteaulx par machines & tormens bellicques, beliers, baliſtes, catapultes, des quelles il nous monſtra la figure, aſſez mal entendue des ingenieux Architectes diſciples de Vitruue : comme nous a confeſſé Meſſere Philebert de l’Orme grand architecte du roy Megiſte. Les quelles quand plus n’ont proficté obſtant la maligne ſubtilité, & ſubtile malignité des ſortificateurs, il auoit inuenté recentement des Canons, Serpentines, Couleuurines, Bombardes, Baſilics, iectans boulletz de fer, de plomb, de bronze, pezans plus que groſſes enclumes, moyenant vne compoſition de pouldre horrificque, de laquelle Nature meſmes s’eſt eſbahie, & s’eſt confeſſee vaincue par art : ayant en meſpris l’vſaige des Oxydraces[2], qui à force de fouldres, tonnoires, greſles, eſclaires, tempeſtes vaincoient, & à mort ſoubdaine mettoient leurs ennemis en plain camp de bataille. Car plus eſt horrible, plus eſpouentable, plus diabolique, & plus de gens meurtriſt, caſſe, rompt, & tue : plus eſtonne les ſens des humains : plus de muraille demoliſt vn coup de Baſilic, que ne feroient cent coups de fouldre.



  1. En la maniere vſitee entre les Methanenſiens de Trezenie. Voyez Nicolas Léonic (II, 38) et Pausanias (II, 34).
  2. Oxydraces. Voyez Philostrate, Vie d’Apollonius de Tyane, II, 33.