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Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/99

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chapitre xviii

Truye en eſpices. Ne vous deſplaiſe ſi ie le diz. Car ie me ſens vn peu faſché. Le contraire eſt veritable. Prenez bien mes motz. La vieille le dict. Ainſi comme la febue n’eſt veue ſe elle ne eſt eſgouſſée, auſſi ma vertu & ma perfection iamais ne ſeroit miſe en renom, ſi marié ie n’eſtoys. Quantes foys vous ay ie ouy diſant que le magiſtrat, & l’office deſcœuure l’home, & mect en euidence ce qu’il auoit dedans le iabot ? C’eſt à dire que lors on congnoiſt certainement, quel eſt le perſonaige, & combien il vault, quand il eſt appellé au maniment des affaires. Parauant, ſçauoir eſt eſtant l’home en ſon priué, on ne ſçait pour certain quel il eſt, non plus que d’une febue en gouſſe. Voylà quant au premier article. Aultrement vouldriez vous maintenir que l’honneur & bon renom d’vn home de bien pendiſt au cul d’vne pvtain ?

Le ſecond dict. Ma femme engroiſſera, (entendez icy la prime felicité de mariage) mais non de moy. Cor Bieu, ie le croy. Ce ſera d’vn beau petit enfantelet qu’elle ſera groſſe. Ie l’ayme deſia tout plein, & ia en ſuys tout aſſoty. Ce ſera mon petit bedault. Faſcherie du monde tant grande & vehemente n’entrera deſormais à mon eſprit, que ie ne paſſe, ſeulement le voyant & le oyant iargonner en ſon iargonnoys pueril. Et benoiſte ſoit la vieille. Ie luy veulx vraybis conſtituer en Salmigondois quelque bonne rente, non courante comme bacheliers inſenſez, mais aſſiſe comme beaulx docteurs regens. Aultrement vouldriez vous que ma femme dedans ſes flans me portaſt ? me conceuſt ? me enfantaſt ? & qu’on diſt, Panurge eſt vn ſecond Bacchus. Il eſt deux foys né. Il eſt René, comme feut Hippolytus, comme feut Proteus, vne foys de Thetis, & ſecondement de la