Aller au contenu

Page:Rabelais marty-laveaux 03.djvu/407

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
399
la sciomachie

la place les deux Caporions Colonnois auecques leurs gens embaſtonnez, aſſés mal en poinct. Puis ſuruindrent les Suiſſes de la garde du Pape auecques leur Capitaine tous armez à blanc, la picque au poing, bien en bon ordre, pour garder la place. Alors pour temporiſer & eſbacre l’aſſemblee magnifique, furent laſchez quatre terribles & fiers taureaux. Les premier & ſecond furent abandonnez aux gladiateurs & beſtiaires à l’eſpee & cappe. Le tiers fut combatu par trois grans chiens Corſes, auquel combat y eut de paſſetemps beaucoup. Le quart fut abandonné au long bois, ſauoir eſt picquees, partuſanes, halebardes, corſecques, eſpieuz Boulonnois : parce qu’il ſembloit trop furieux, & euſt peu faire beaucoup de mal parmy le menu peuple.

Les taureaux deſconfitz, & la place vuyde du peuple iusques aux barrieres, ſuruint le Moret archibouffon d’Italie, monté ſus vn bien puiſſant rouſſin, & tenant en main quatre lances liees & entees dedens vne, ſoy vantant de les rompre toutes d’vne courſe contre terre. Ce qu’il eſſaya, fierement picquant ſon rouſſin, mais il n’en rompit que la poignee, & s’accouſtra le bras en coureur buffonique. Cela fait, en la place entra au ſon des fifres & tabours vne enſeigne de gens de pied, tous gorgiaſement accouſtrez, armez de harnois presque tous dorez, tant picquiers qu’eſcoulpetiers en nombre de trois cens, & plus. Iceux furent ſuiuis par quatre trompettes, & vn eſtanterol de gens de cheual, tous ſeruiteurs de ſa Maieſté, & de la part Françoiſe, les plus gorgias, qu’on pourroit ſouhaiter : nombre de cinquante cheuaux, & d’auantage. Lesquelz la viſiere haulſee feirent deux tours le long de la place en grande alaigreſſe faiſans poppizer, bondir, & penader leurs cheuaux, vns