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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/110

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— J’aime pas qu’on m’embrasse ! déclara-t-elle durement.

Confus, le bon Jacquiat se sentit pénétrer d’une émotion étrange vis-à-vis de cette petite fille nerveuse, aux cheveux de femme, qu’un baiser trouvait récalcitrante.

En haut de la montagne on s’assit pour admirer le paysage. Mary récita sa fable et madame Corcette, très allumée, lui indiqua les intonations à prendre.

— Elle possède un masque tragique, disait-elle, moi je me chargerai de lui former son répertoire.

Le faible de la jeune femme était la scène tragique. On lui fit dire un morceau d’Athalie, son triomphe, dans lequel, malgré ses gestes désordonnés, elle avait tous les ridicules. Mary et les officiers, secoués d’un fou rire, se roulèrent dans les buissons.

Rien, en effet, ne pouvait être plus drôle que cette créature mise à la dernière mode, ayant toque et chignon, brandissant son parapluie au sein de la pure atmosphère de la colline pendant que les oiseaux, réveillés par une journée très douce, allaient d’arbre en arbre avec des gazouillements de plaisir.

D’ailleurs l’actrice ne se fâchait point, acceptant ce genre de succès comme un autre et se bornant à leur dire :

— Vous ne sentirez jamais les belles choses, tas de polissons que vous êtes !…

On revint au Rendez-vous des cascades pour dîner