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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/112

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sions pour sa femme. Les autres vidaient des fioles de chartreuse. Enfin, vers minuit, on apporta un punch colossal, Corcette monta sur une table, presque gris, il fit un discours avec des imitations impayables… Il singeait tour à tour tous les officiers supérieurs du régiment, et Mary, qui s’endormait derrière un paravent en attendant qu’on vint la prendre pour la porter dans le lit blanc et bleu, se réveilla subitement à la voix grondeuse de son père, voix que ce diable d’homme contrefaisait au mieux :

« Oui, Messieurs, clamait le capitaine, on est heureux de se réunir dans de solennelles circonstances pour se retremper en vue des devoirs sacrés du lendemain… La France, Messieurs, la bonne tenue du régiment, la prospérité du règne de Napoléon III, le poil de nos chevaux… »

Mary ne put en saisir davantage, Manette était venue pour l’emporter, et elle se figura, l’innocente, que chaque réunion, au 8e hussards, se terminait par les mêmes recommandations graves sur le service !

Une semaine s’écoula ainsi en distractions étourdissantes, on voulait éblouir la fille de son colonel, Mary avait eu déjà une petite indigestion de crème et elle s’était donné une entorse, cependant elle riait de bon cœur, ses cheveux toujours au vent, elle se colorait les joues d’une grosse pourpre de gaieté, oubliant la mort des chats, la méchanceté de M. Anatole, lorsque, le samedi matin, madame Corcette, après une longue conférence avec Tulotte,