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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/286

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ne réclamait pas contre cette énormité crachée à sa face de professeur estimable ! Joli, l’honneur d’Antoine-Célestin !… Non ! il ne disait rien, il pleurait dans ses mains sautillantes, le gâteux.

— Sacrebleu ! s’exclama Tulotte redressée, prenant l’aplomb de jadis, quand elle morigénait son cadet. Qu’est-ce que tu as dans les veines, toi, Monsieur le docteur ? On te confie une enfant, tu la fais pourrir au grenier pendant trois ans, puis, sans crier gare, il te la faut toute la journée autour de toi… et tu lui apprends à lire des livres qui me font rougir malgré mon âge… Tu es digne des tribunaux, mon bonhomme !

Elle se campa devant lui.

— Réponds un peu, Monsieur le docteur, a-t-elle menti ?

Il écarta ses mains.

— Je veux encore l’épouser. Elle refuse. Tulotte… ne me dis pas que je la pervertissais, je l’aimais. Je ne la touche pas, je ne l’embrasse pas… mais… elle va trop loin, ma bonne Tulotte, elle me tuera. Quelle honte !

Mary le regardait pleurer. Une indicible satisfaction éclairait sa brune physionomie. Tulotte hochait la tête, grimaçant une moue de dédain.

À partir de cet instant, l’intimité de la famille fut rompue. L’enfer s’ouvrit pour le docteur Barbe ; elles s’entendirent au sujet des cruautés à lui faire. Tulotte, lâchée dans toutes les bouteilles de la cave, affichait son vice, disant qu’il lui fallait bien boire