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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/298

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deurs des jeunes filles, ni les goûts des prostituées, mais une nonchalance indifférente, tolérant beaucoup, jointe à la beauté d’une statue grecque. Dès qu’il voulait, elle ne voulait plus ; sa science tenait toute dans ce refus perpétuel de son être qu’elle abandonnait pourtant à de certaines heures, quand le mari épuisé par des luttes successives se mordait les poings, rageur et impuissant. Alors, comme un camarade un peu railleur, elle avouait que son mépris de l’homme s’accentuait davantage.

Oui, elle avait pensé juste en pensant que l’amour était un sentiment ridicule ! Et l’amour qui finit est trop court ! À la place des mâles, elle ne se serait pas vantée d’être amoureux, quand une minute venait qui les rejetait vaincus pour une résistance relativement légère.

Sans son oncle, et elle n’expliquait pas tout à fait cette cause, elle aurait ambitionné de demeurer à jamais la vierge glaciale, imprenable.

— Mais tu finiras par m’aimer ?… répétait-il ivre de son regard froid qu’elle lui lançait comme une aumône.

— Non… seulement je n’aimerai personne, je le crois.

— Ah ! si tu me trompais, je te tuerais, Mary… Sur mon honneur de gentilhomme, je jure que je te tuerais !

— Bah ! vous juriez que vous ne céderiez pas à mes petites volontés. Vous avez eu peur, hein ?…

Il la prenait à plein bras, ayant l’idée folle de la