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Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/116

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— À votre âge, je n’en savais pas si long, moi ! dit Caroline scandalisée.

— Peut-être qu’à mon Âge vous n’étiez pas encore mariée, madame, riposta Louise, de plus en plus audacieuse.

Suffoquée, Caroline se mit à trier les torchons d’une lessive, tournant le dos au métier et pendant une heure on n’entendit que le petit bruit discret de la laine frottant le canevas.

Tout d’un coup, le docteur fit irruption. M. Rampon venait causer un brin avec ces dames, il était bien aise de les trouver ensemble : la tranquillité des familles c’est la santé, n’est-ce pas ?

— Docteur, dit Caroline pinçant la bouche, je veux vous consulter à propos de ma belle-fille…

Et, à brûle-pourpoint, elle lui lança cette phrase cruelle : Comprenez-vous donc, vous, un homme distingué, un savant, que l’on soit stérile à vingt et un ans quand on mange comme elle mange ?

Louise posa son aiguille, elle se retourna, très rouge.

— Oh ! madame, implora-t-elle, de grâce ne parlez plus de cela !

— Et pourquoi ? gronda le docteur, se carrant dans un fauteuil. C’est un sujet qui nous intéresse tous, madame Bartau jeune. Tous, lui, vous, votre mère… moi-même, je m’en inquiète souvent, très souvent. J’ai vu sauter Louis autour de ce fauteuil où je suis assis… Un fier petit gamin, je vous assure. Je l’ai mis dans ses premières culottes… Un garçon fort bien conditionné, madame, et destiné à faire des prouesses comme nos aïeux. Moi je me