Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/150

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— Il nous en faudra davantage, si ce cœur est très dur, murmura doucement le plus jeune frère.

Tout le monde le regarda, sauf Louis qui rédigeait une facture détaillée. Caroline eut un sourire bienveillant à son adresse.

— C’est miraculeux comme il est beau, ce garçon ! pensa-t-elle.

Et Tranet marmotta :

― Quel petit gommeux !… Louis est absolument fichu s’il ne lève pas le nez.

M. Rampon fronça les sourcils.

— Vous êtes Parisiens ? dit-il, de mauvaise humeur, car ces pantins lui avaient coupé le fil de son discours.

— Un peu moins que provinciaux, beaucoup plus que Parisiens, répliqua ironiquement le gommeux : nous sommes artistes.

— Oh ! oh !

Il se fit un grand silence.

Marie, sur un signe de maman Bartau, apporta la cave aux liqueurs. Un marché pareil ne se conclurait pas sans quelques petits verres de cassis. Et puisqu’ils voulaient racheter de ce vieux cœur dont il était si difficile de se débarrasser…

— Messieurs, il ne fait pas chaud, ce soir, vous allez boire une goutte avant de partir.

Hector regarda son cadet. Celui-ci acquiesça d’un geste aimable.

— Nous boirons toutes les gouttes que vous voudrez, répondit-il avec un franc éclat de rire.

Ces jeunes gens n’étaient point mélancoliques et point trop fiers. Ils avalèrent le cassis en faisant des mines émerveillées.