Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/217

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gain de passion bestiale, le maudissant, se maudissant surtout, elle, la raffinée, elle, le génie de l’amour, et tombant encore à l’occasion comme une sauvage des temps primitifs. Tantôt, elle lui fermait sa porte pour se livrer tout entière à l’éducation d’une autre victime, Louise, qu’elle comblait de cadeaux et de flatteries, essayant de terrasser l’amour vulgaire par l’amour factice. Hector Carini, son aîné, lui avait dît souvent, du temps des travaux d’Amboise : « Prends garde, Marcelle, tu te blaseras, et il ne te faudrait qu’une heure d’ennui pour te faire sauter le caisson. »

Hector était parti d’Amboise ; ce garçon gouailleur ne la morigénait plus. Il travaillait à Paris aux sculptures d’un monument quelconque. Il l’abandonnait aux folles inspirations de son hystérie et elle ne se sentait plus le courage de le rejoindre.

Louis Bartau l’examinait, souriant.

— Tu seras invitée à ce beau mariage : ne refuse pas, je t’en prie, ce sera si drôle !

— Sans doute ! je me prépare un succès de toilette. À propos, je donne une soirée chez moi. Vous deux, Louise, toi, eux, le père, la mère… souper monstre, des fleurs, des bougies, de la musique, ce sera ridicule et grandiose, car je veux te retenir la nuit pour nous aimer.

Il s’agenouilla, se frotta contre le satin de sa robe.

— Dis donc, s’ils savaient que c’est moi qui paye la dot du marié, ils seraient capables de rompre.

— Ne leur raconte jamais cela, les vieux vont nous octroyer la paix, je pense ! Car ils