Aller au contenu

Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tres. Le paysage n’a pas changé ; mais j’ai changé, moi, avec le temps. L’illusion de mon esprit prêtoit son coloris à la nature ; elle est perdue ! Si dans votre vie, ma chère Blanche, vous revenez en ce lieu après en avoir été absente pendant plusieurs années, vous vous rappellerez peut-être les sentimens de votre père, et vous les comprendrez alors.

Blanche affligée de ces paroles, garda le silence : elle porta ses idées sur l’époque que le comte lui faisoit envisager. Elle conçut que celui qui parloit, probablement alors, n’existeroit plus ; elle baissa les yeux, et les sentit se remplir de larmes. Elle donna sa main à son père, il lui sourit avec tendresse ; et se levant de sa chaise, fut chercher une fenêtre pour dérober son émotion.

Les fatigues de la journée engagèrent la compagnie à se séparer de bonne heure. Blanche, à travers une longue galerie boisée de chêne, se rendit à son appartement. Il étoit spacieux, fort élevé, les fenêtres gothiques en étoient hautes, et son air lugubre n’étoit pas propre à la dédommager de la position écartée où il se trouvoit. Les meubles étoient fort antiques ; le lit étoit de damas bleu, garni de franges d’argent,