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Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/36

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Mais n’oublions point que nous sommes ici en présence d’une œuvre juridique et non point économique. Aussi bien cette œuvre eut-elle sa grandeur. Malgré les mépris et les aversions dont le droit romain est devenu l’objet de bien des côtés et pour des causes bien diverses, il a servi la raison et fait avancer l’a justice, avec son culte inflexible de la logique et ses scrupules sur ce qu’il appelait si élégamment les inelegantioe juris. L’Église, en un temps, ne lui refusa pas non plus ses hommages, et des Papes saluèrent comme « vénérables » les « lois romaines que la Divine Providence avait fait promulguer par la bouche des empereurs[1] ».

En matière de politique douanière, la Grèce paraît avoir été partagée entre les idées de fiscalité et de mercantilisme[2].

Quant à l’Empire romain, s’il avait eu jamais autre chose qu’une politique militaire et une politique fiscale, il est clair que cette politique douanière, pour lui aussi, aurait été basée sur les théories mercantilistes les plus étroites. Le Sénat, au témoignage de Cicéron, avait renouvelé plusieurs fois la défense d’exporter de l’or. — de Rome probablement[3] ; — et un peu plus d’un siècle après Cicéron, Pline l’Ancien se plaignait amèrement que l’achat des produits de l’Extrême-Orient, importés jusqu’aux frontières romaines par les caravanes venues de l’Inde ; de la Chine et de l’Arabie, fût pour l’Empire une cause puissante d’appauvrissement, qu’il évaluait à un équivalent de 20 millions de francs chaque année (à supposer que le pouvoir de la monnaie n’ait pas varié depuis lors)[4]. Enrichi jadis

  1. « Venerandæ romanæ leges divinitus per ora principum promulgatæ » (Corpus juris canonici, cité par Amédée Thierry, dans le Tableau de l’Empire romain, 6e édition, 1, V, ch. II).
  2. Souchon, Théories économiques dans la Grèce antique, pp. 100 et s.
  3. « Cum aurum, Judarorum nomine, quotannis ex Italia et ex omnibus provinciis Hierosolyma ? exportari soleret, Piaccus sanxit ediclo ne ex Asia exportari liceret… Exportari aurum non oportere, quum sa ; pe antea senatus, tum me consule, gravissime judicavit » (Cicéron, pro Flacco, xxviii).
  4. « Suivant les calculs les moins exagérés, les Indiens, les Sères et l’Arabie enlèvent à l’empire romain pour une valeur de mille fois cent mille sesterces,