Aller au contenu

Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/55

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de tous ceux qui peuvent échanger entre eux et dont le contact possible détermine ce que nous appellerions aujourd’hui les limites d’un marché[1] ; enfin, ce besoin commun est lui-même rapporté à l’abondance ou à la rareté des marchandises[2]. Tout cela n’est pas autre chose qu’une judicieuse analyse de la loi de l’offre et de la demande.

Il est difficile après cela de souscrire à l’opinion, de certains socialistes chrétiens contemporains, d’après lesquels on devrait plonger jusqu’au cœur de la philosophie scolastique pour trouver les origines de la thèse de Karl Marx sur le travail cause et mesure de la valeur. À les en croire, les anciens écrivains ecclésiastiques, notamment saint Thomas et Duns Scott, auraient professé la doctrine que c’est le travail seul qui détermine la valeur ; et ce ne seraient que des auteurs théologiques plus récents qui auraient admis que les droits du propriétaire peuvent avoir une influence, très secondaire du reste, sur la valeur des produits obtenus[3]. La vérité, c’est que l’Église a toujours reconnu la culture par autrui et le droit du propriétaire aux fruits moyennant entretien ou salaire des travailleurs

  1. Buridan, recteur de l’Université de Paris, mort en 1328 : « Valor rei non debet attendi secundum dignitatem rei, sed solum secundum indigentiam humanam.,..Indigentia istius vel illius hominis non mensurat valorem, sed indigentia communitatis eorum qui inter se commutare votant » (Commentarii in Ethicam, 1. V, quæst. xv et xvi).
  2. Langenstein (1325-1397), vice-chancelier-de l’Université de Paris et un des fondateurs de l’Université de Vienne : « Quantitas indigentise communis in ordine ad multitudinem vel paucitatem rerum ».
  3. Rudolf Meyer, Der Kapitalismus fin-de-siècle, p.33 : « Die alten kirchlichen Schriftsteller führen unter den Momenten, welche auf den gerechten Preis bestimmend einwirken, die verschiedenartigsten Dinge auf. Irgends jedoch findet man unter diesen Dingen eine Entschædigung fur die Capitalnützung. Im allgemeinen bestimmt sich bei ihnen der Werth durch die Arbeit… Uberhaupt ist bei allen alten canonischen Schriftstellern die Arbeit die einzige Quelle der Werthe, neben der erst spseter bei— jüngeren theologischen Autoren noch der Boden eine secundære Bedeutung hat. » Malheureusement il n’est pas dans l’habitude de Meyer, ni des sophistes, de citer aucun texte que l’on puisse vérifier. —Voyez aussi op. cit., p. 31 : « À l’origine, ce que le cultivateur donne au propriétaire, n’est pas autre chose que l’impôt moderne. Ce n’est pas un revenu sans travail, qui découle du droit positif de propriété, ce n’est pas une rente foncière. » — Expliquez donc avec cela le colonat et la pensio. C’est bien là cependant une période assez ursprünglich !