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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/177

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sont le monument de sa foi. Elles nous en révèlent les crises et les victoires ; elles nous apprennent par quelle voie Pascal fut sans cesse ramené au pied de cette croix, que, dans ses heures d’extase, il embrassait avec tant d’ardeur. Demander si les Pensées ont vieilli, c’est demander s’il y a chance que l’homme de nos jours soit ramené au christianisme par le chemin qui y reconduisait Pascal ; c’est demander si Pascal, qui, au dire d’un critique, se donne procuration pour représenter le genre humain, représente encore l’homme que nous connaissons, l’enfant du dix-neuvième siècle.


Pascal commence par l’étude du cœur humain. A-t-il le droit de procéder ainsi ? On le lui a contesté.

Ma grande dispute avec Pascal, dit Voltaire, roule précisément sur le fondement de son livre.

Il prétend que, pour qu’une religion soit vraie, il faut qu’elle connaisse à fond la nature humaine, et qu’elle rende raison de tout ce qui se passe dans notre cœur.

Je prétends que ce n’est point ainsi qu’on doit examiner une religion, et que c’est la traiter comme un système de philosophie ; je prétends qu’il faut uniquement voir si cette religion est révélée ou non.[1]

L’objection est sérieuse ; mais elle l’était surtout il y a cent ans. Au dix-huitième siècle, époque d’ardente polémique, il était naturel qu’on s’efforçât

  1. Voltaire. Lettre au père Tournemine, 1735.