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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/180

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de sable entraîné dans les espaces par la puissance du soleil ; le soleil, à son tour, n’est qu’un point très délicat dans l’étendue du firmament. Mais voici bien un autre prodige. Dans le plus chétif des êtres vivants, l’homme entrevoit un infini non moins merveilleux que celui des voûtes célestes. Dans le corps du ciron, il y a des jointures et des veines ; dans ces veines, il y a du sang ; dans ce sang, des humeurs ; dans ces humeurs, des gouttes, et chacune de ces gouttes est un monde. La nature offre à l’imagination mille fois plus qu’elle ne peut concevoir. Le monde visible n’est qu’un atome ; les atomes sont autant d’univers ; et l’homme, suspendu entre ces deux abîmes, est un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout.

L’homme est un être contradictoire en soi, c’est un compromis incompréhensible entre le néant et l’infini. La contradiction de sa nature se retrouve dans chacune de ses facultés, dans chacune de ses œuvres.

L’homme a besoin de connaître ; mais que peut-il connaître ? Les extrêmes lui échappent. Sa grandeur lui dérobe la vue de l'infiniment petit ; sa petitesse lui dérobe la vue de l’infiniment grand. Tout s’enchaîne dans l’univers. Pour comprendre le tout, il faudrait en connaître chaque partie ; pour connaître une partie, pour saisir le rôle qu’elle joue, il faudrait