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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/193

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partout les genoux prompts à plier. Sur le sol privilégié de l’Europe, patrie de la civilisation, n’y a-t-il plus ni oppresseurs, ni opprimés ? J’applaudis aux progrès de l’esprit public ; je sais qu’ils ont rendu les nations plus clairvoyantes en fait de justice ; mais ils leur ont, du même coup, rendu l’arbitraire plus pénible. Une tyrannie cent fois moindre les fait souffrir cent fois plus. Jadis le sang innocent pouvait couler à flots sans qu’on entendît d’autre plainte que celle des agonisants. De nos jours, la moitié de l’Europe s’émeut pour deux infortunés que l’intolérance plonge dans un cachot. C’est là, sans doute, la gloire de notre siècle ; mais aussi longtemps que la nécessité de pareilles protestations demeure possible, le société qu’a décrite Pascal n’est pas morte entièrement.

L’homme, tel que l’a peint Pascal, est encore l’homme que nous connaissons. On dit que le portrait en est chargé : on signale certaines expressions trop fortes, certaines teintes trop sombres. Mais qu’importent quelques mots dans ces notes dont la mort a trahi le secret. Pascal les eût adoucis ou préparés, ces mots trop brusques ou trop vifs. Le fond subsiste, et le fond, c’est l’essentiel.

À celui qui persisterait à contester la ressemblance de ce triste portrait, nous opposerions un témoignage difficile à récuser, celui de la littérature contemporaine, qui semble s’être donné la tache de commen-