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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/365

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homme, et Kant nous avait dit avant lui que le jugement esthétique est entièrement subjectif. Donc, chercher un goût qui fasse règle, c’est chercher un homme dont la pensée fasse loi. Cela se fait à Rome en ce moment, et il ne faut point désespérer de voir bientôt quelque père jésuite déduire des schéma pontificaux une rhétorique infaillible.

Allons-nous, peut-être, procéder à la façon des démocraties, et nous mettre à compter les suffrages ? Vaines et puériles tentatives ! Il faudrait recommencer tous les jours. Les faits parlent ici plus haut que tous les raisonnements du monde. On pouvait encore se faire illusion il y a quelque chose comme un siècle. Cette question du goût est une question française. Il n’était pas entièrement impossible de croire à un goût régulateur quand les hommes lettrés de l’Allemagne, de l’Angleterre et même de l’Italie avaient les yeux tournés vers la France comme vers la patrie du goût. C’était le temps ou Voltaire disait :

Faites tous vos vers à Paris,
Et n’allez point en Allemagne.

Mais dès lors se sont opérées d’ardentes réactions nationales. La France avait obtenu une sorte d’hégémonie dans la république des lettres ; elle a eu le tort d’en abuser, et elle en a été punie avec excès, comme il arrive toujours. Il n’y a pas aujourd’hui de