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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/397

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preuve d’une puissance dialectique qu’on ne lui aurait pas soupçonnée auparavant et qu’elle a gardée dès lors ; au siècle suivant, elle se façonne à l’élégance, c’est un pli nouveau qu’elle prend et qui, malgré bien des révolutions, n’est pas encore effacé. Aujourd’hui, la prose allemande, la prose savante, fait avec succès l’apprentissage de la clarté. On constate des faits semblables dans l’histoire même de la poésie. Il y a un demi-siècle à peine, Lamartine trouvait dans notre langue des trésors d’harmonie jusqu’alors ignorés, et comme s’il avait reçu du ciel la puissance de communiquer à d’autres une partie de son talent, on a vu dès lors la moyenne harmonique des vers français s’élever sensiblement.

Mais il n’est guère moins facile de noter des pertes correspondantes à chacun de ces progrès. Elle est bien vigoureuse, la prose de Calvin, il est bien noble, le vers de Malherbe ; mais que de grâces naïves perdues sans retour ! que de mots heureux, riches de sens et d’expression, désappris pour jamais ! Qui sait si la pensée allemande, en s’exerçant à une expression plus claire, ne perdra pas quelque chose de sa profondeur, de sa vigoureuse patience ? Et quant à la poésie de Lamartine, qui n’en voit recueil prochain dans la grâce efféminée et la mollesse d’une rêverie sans objet ?

Pour oser trancher la question du progrès, en ma-