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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/48

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multipliait les difficultés déjà nombreuses qui entouraient Calvin ; mais il n’hésita pas un instant. Il comprit que supporter la présence de Servet à Genève, c’était signer sa propre abdication, en renonçant à son rôle de grand-maître de l’orthodoxie protestante ; tout comme plier devant le Petit conseil ou devant la faveur populaire qui protégeait Berthelier, c’eût été signer son abdication en renonçant à son rôle de grand-maître de la discipline morale. Or, Calvin, le représentant de Dieu, ne pouvait pas abdiquer. Il résolut de mener les deux luttes de front.

Les lois de Genève statuaient que dans toute cause criminelle, l’accusateur devait se constituer prisonnier avec le prévenu, pour subir la peine qu’aurait méritée celui-ci, si la fausseté de l’accusation venait à être démontrée. Calvin ne pouvant abandonner ses fonctions pour s’enfermer avec Servet, engagea un de ses disciples qui lui servait de secrétaire intime, Nicolas de la Fontaine, à se porter officiellement partie criminelle contre l’hérétique. Nicolas de la Fontaine y consentit, et dans un acte d’accusation rédigé par Calvin, il demanda que Servet fût examiné sur divers points de doctrine, sur le dogme de la Trinité, sur la nature de l’âme, sur l’impeccabilité des enfants et sur le baptême. Après les griefs théologiques, il s’en trouvait un d’une autre sorte :

Item, porte le factum de de la Fontaine, qu’en la personne de M. Calvin, ministre de la parole de Dieu