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Page:Ramuz - Les Signes parmi nous.djvu/77

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peu de verre au bout de la canne, se retournent, font avec les bras un grand mouvement, et ils chantent pendant ce temps. Puis ils sont interrompus de chanter, parce qu’ils soufflent dans leur canne, mais le chant qu’ils laissent tomber est tout de suite ramassé.

Et ils chantent pour oublier : des chants jamais finis, jamais commencés, lancés en l’air, puis renvoyés ; eux qui sont dans l’étang de feu et ils y ont été jetés ; dur métier et plus dur encore quand ils se mettent à comparer.

Parce qu’alors voilà tout autour d’eux ces autres. Tout autour d’eux ces gens d’ici (et eux ne sont pas d’ici.) Et eux dans cet enfer, ces autres en paradis. Et eux propriétaires de rien, même pas d’eux-mêmes ; ces autres tous propriétaires, propriétaires d’un soi-même, d’un bout de champ, d’une maison, propriétaires de leur temps et de