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Page:Ratel - La Maison des Bories.pdf/30

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LA MAISON DES BORIES

— Corbiau ! Corblau !

« Tout de même, s’il était arrivé quelque chose à cette petite ? Si elle était malade ? Si elle souffrait ? Si elle appelait sans être entendue ? Si elle pleurait toute seule dans un coin en se croyant abandonnée une seconde fois ? »

Une chaleur d’angoisse monta au visage d’Isabelle et sa voix se fêla :

— Corbiau ! Réponds-moi, mon Corbiau !

— Je suis là.

Elle arrivait tranquillement, par le chemin de la ferme, sans que nul pût dire d’où elle était sortie, et elle souriait, comme si elle venait de faire une promenade agréable, sans inquiétude pour personne.

Isabelle la prit par la main et l’emmena goûter au triple galop, avec la crainte subite que Laurent n’eût englouti tous les croquets.



À mesure que l’heure du travail approchait, Laurent se sentait démangé d’un désir de plus en plus vif de se rendre utile. Il proposa successivement d’aider Marie-Louise à éplucher les légumes, de cueillir une salade de pissenlits pour le dîner, d’arroser le jardin à la place de Ludovic, de graisser la roue de la brouette, de repriser ses chaussettes, de monter une bande de canevas sur le métier à tapisserie et de cirer le parquet. Sa mère déclinait gravement ces offres l’une après l’autre et Laurent la regardait d’un air à la fois déçu, furieux et interdit d’admiration.

Cinq heures sonnèrent. Isabelle se leva :

— Allons, dit-elle, assez tortillé. Les leçons.

Laurent poussa un soupir tragique et Lise répéta en éclatant de rire : « Assez tortillé. » C’était une des expressions familières d’Isabelle. Il y en avait d’autres, par exemple : « Mais ne me racontez donc