Page:Ravaisson - De l’habitude, 1838.djvu/43

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et sa mort ; est-ce une idée ou un être, ou ne serait-ce pas plutôt une idée et un être à la fois, une idée concrète et substantielle hors de toute conscience, qui fait la maladie[1] ? Ne serait-ce pas là aussi le secret divin de la transmission de la vie, comme d’une idée créatrice, qui se détache et s’isole dans le transport de l’amour pour vivre de sa vie propre, et se faire à elle-même son corps, son monde et sa destinée[2] ? Ne serait-ce pas, de la même manière, le secret de la transmission de la maladie elle-même, de l’idée substantielle de la maladie, qui attend son temps et son heure pour être dans le fils ce qu’elle était dans le père, et qui se propage avec ses formes et ses périodes immuables de génération en génération[3] ?

Enfin, non seulement la forme la plus relevée de la vie dans l’humanité, l’activité motrice, renferme en abrégé toutes les formes inférieures qui se développent dans les fonctions subordonnées ; mais la série de ces fonctions n’est elle-même que le résumé du développement général de la vie dans le monde, de règne en règne, de genre en genre, d’espèce en espèce, jusqu’aux plus imparfaits rudiments et aux éléments les plus simples de l’existence. Le monde, la nature entière offre l’aspect d’une progression continue où chaque terme est la condition et la matière de tous les termes supérieurs, la forme de tous les inférieurs, et où chacun se développe, par conséquent, et se représente

  1. Voy. Van Helmont, De ideis morbosis, De morbis archealibus, etc. Barthez, passim. — Sydenham (Opp. init.) définit la maladie : la méthode de la nature pour expulser le principe malfaisant. Cette définition implique également l’idée morbide ; mais il faut prendre l’idée in concreto, εἶδος ἔνυλον. Voy. Stahl, V. Helmont et Barthez sur les effets des poisons, des virus contagieux et des passions violentes, qui impriment au principe vital des formes ou idées morbides correspondantes.
  2. V. Helmont, De morbis archealibus, p. 550, b.
  3. id. ibid. Burchart (præside Stahlio), De hæreditaria dispositione ad varies affectus (1706, in-4o). Jung, De consuetudinis efficacia, p. 13.