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Page:Rebell - Les nuits chaudes du cap français, 1900.djvu/142

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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


vé ? Voyons ! Voulez-vous répondre canailles ? » Alors, au milieu de gémissements et avec toutes sortes d’excuses pour se mettre hors de cause, Marion, Catherine, des filles de cuisine qui surviennent, me versent leur bavardage intarissable, se coupant la parole, se contredisant, s’enfiévrant, parlant toutes à la fois, et ainsi elles essaient de me raconter ou plutôt de me faire deviner l’aventure. « Les demoiselles étaient à s’habiller, nous, nous préparions le dîner. — Dis donc que tu dormais ! — Si on peut mentir !… — Je mens point. Même que je disais : elle fait plus de bruit à elle seule en ronflant que toute la maison en travaillant. C’est vrai que ces demoiselles qui s’ébattent comme des diables d’ordinaire, ne menaient cette fois pas plus de tapage que de petites souris. On pensait qu’elles s’étaient endormies… Mais voici tout à coup un cri, puis deux, puis toute une suite qui partent de la chambre de Mam’zelle, des cris à emporter le gosier de qui les pousse, des cris qui vous entrent dans le cœur. Catherine a peur, elle veut se sauver. — Non, c’est toi ! — C’est elle maîtresse ! J’ai dû l’emmener avec la cuisinière. Nous la tenions chacune par un bras. Nous arrivons ainsi à la chambre de mam’zelle Antoinette. Bon Dieu ! qu’est-ce que nous voyons ! Des chaises renversées, les draps du lit arrachés, des traces d’ongles sur la tapisserie comme si on s’y était accroché, mais personne… La fenêtre était grande ouverte et, à présent, les cris venaient du dehors ; nous avons regardé dans le jardin : deux diables de nègres, des solides et qui