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Page:Rebell - Les nuits chaudes du cap français, 1900.djvu/226

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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


poignard qu’elle levait sur lui en lui criant les plus abominables injures.

Antoinette, se voyant seule, se hâta de fuir ; et déjà, elle enjambait la fenêtre, lorsque Zinga survint. Du poteau où la négresse était attachée, elle avait entendu le tumulte et les cris des nègres. Elle s’imagina que c’était Dubousquens qui arrivait avec une escorte pour enlever Antoinette. Zozo prétend qu’il a vu Samuel Goring la détacher ; Troussot soutient au contraire que la rage que la négresse avait conçue pour ma malheureuse enfant lui prêta une force extraordinaire et qu’elle parvint à briser ses liens. En une minute elle fut devant la maison ; elle aperçut à la fenêtre la fugitive qui lui tournait le dos, les pieds en l’air, prête à sauter. Elle la saisit brusquement par les jambes. Antoinette poussa un cri, lâcha prise, tomba. Zinga se rua sur elle et plusieurs fois lui frappa la tête contre la muraille. Des nègres de la plantation aperçurent cette misérable s’acharnant contre mon enfant. Comme c’était une blanche, ils ne se soucièrent point de venir à son secours et restèrent paisibles spectateurs de cet assassinat. Antoinette ne se défendait pas, mais de toutes ses forces elle appelait :

— À moi, Pierre ! Pierre ! à moi.

Les appels bientôt furent indistincts ; Zinga l’avait saisie à la gorge ; on n’entendit plus que les cris rauques, puis un râle horrible qui annonça la fin de cet égorgement. Zinga grisée de haine, n’abandonna point sa victime, mais ne cessait de lui piétiner le corps.

— Pourriture de fillasse ! cria-t-elle, m’as fait tor-