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Page:Reclus - Histoire d'une montagne, 1880.djvu/208

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L’ÉTAGEMENT DES CLIMATS.

phénomènes qui l’émeuvent, car, à force d’étudier les plantes, il finit par sympathiser avec elles. Cette vue qui lui fait battre le cœur est causée par l’expatriation forcée d’herbes et de mousses violemment entraînées dans un climat pour lequel elles ne sont pas faites. Dans leur chute ou leur glissement du haut des escarpements supérieurs, les rocs ont apporté leurs flores, semences, racines, tiges entières. Semblables aux fragments d’une planète lointaine qui feraient débarquer sur la terre les habitants d’un autre monde, ces roches descendues des sommets servent aussi de véhicules à des colonies de plantes. Les pauvrettes, étonnées de respirer une autre atmosphère, de se trouver en d’autres conditions de froid et de chaleur, de sécheresse et d’humidité, d’ombre et de lumière, cherchent à s’acclimater dans leur nouvelle patrie. Quelques-unes des étrangères arrivent à se maintenir contre la foule des plantes indigènes qui les entourent ; mais la plupart ont beau se grouper, se serrer les unes contre les autres, comme des réfugiées que tout le monde hait et qui s’entr’aiment d’autant plus, elles sont condamnées