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HISTOIRE D’UNE MONTAGNE.

faible importance relative, sont les rochers de grès ou de conglomérats composés de fragments cimentés. Partout où la pente du sol favorise l’action de l’eau, celle-ci délaye le ciment et se creuse une rigole, une fente étroite qui, peu à peu, finit par scier la roche en deux. D’autres courants d’eau ont également creusé dans le voisinage des fissures secondaires, d’autant plus profondes que la masse liquide entraînée est plus abondante ; la roche ainsi découpée finit par ressembler à un dédale d’obélisques, de tours, de forteresses. On voit de ces fragments de montagnes dont l’aspect rappelle maintenant celui de villes désertes, avec leurs rues humides et sinueuses, leurs murailles crénelées, leurs donjons, leurs tourelles surplombantes, leurs statues bizarres. Je me souviens encore de l’impression d’étonnement, voisine de l’effroi, que je ressentis en approchant de l’issue d’une gorge envahie déjà par les ombres du soir. J’apercevais de loin la noire fissure, mais, à côté de l’entrée, sur la pointe du mont, je remarquais aussi des formes étranges qui me semblaient des géants alignés. C’étaient de hautes colonnes d’argile