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Page:Reclus - L'Homme et la Terre, tome III, Librairie universelle, 1905.djvu/601

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peuple français, soldat de dieu

commandement absolu de ses hommes non en vertu de son talent, de son mérite reconnu, mais de par son droit de naissance ou de rang. Les combattants qu’il employait avaient été choisis parmi ses serfs ; sans avoir préalablement reçu d’instruction militaire, ils avaient à se battre non pour la victoire de tous mais pour la gloire spéciale de leur chef, et, quand ils faisaient un prisonnier ou capturaient un cheval, on
D’après Sybel.
murailles d’antioche.
trouvait tout naturel qu’ils allassent mettre leur prise en lieu sûr avant de revenir à la bataille. Donc, toutes les manœuvres d’ensemble étaient impossibles. L’art militaire n’eut de nouveaux adeptes qu’après la rencontre des Croisés et des armées mahométanes. Les chevaliers chrétiens apprirent de leurs ennemis à former des troupes solides, dressées régulièrement à la guerre, en vue d’un triomphe collectif. Cependant il parait que l’art des sièges n’avait pas été complètement perdu : des ingénieurs spéciaux s’étaient transmis de père en fils l’art de pousser des tranchées et de préparer les assauts[1].

Dès les premières années de leurs relations avec les musulmans, — si violent que fût entre eux le fanatisme des haines religieuses —, les chrétiens se laissèrent « orientaliser » d’une manière très sensible. Tout naturellement, les conditions du climat se firent d’abord sentir dans le vêtement, les repas, les pratiques journalières : c’est par une

  1. Paul Meyer, Introduction à Girart de Roussillon, pages lxx, lxxi.