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Page:Reclus - L'Homme et la Terre, tome IV, Librairie universelle, 1905.djvu/260

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l’homme et la terre. — découverte de la terre

la cause de l’ignorance dans laquelle le monde est resté relativement à leurs découvertes géographiques aussi bien sur la côte américaine que sur celle d’Afrique : aucun monument écrit ne rappelle leur gloire. On doit se borner à constater ce fait, d’ordre général, que les Dieppois prenaient une grande part au commerce des denrées venues d’Afrique, notamment à celui de la malaguette ou poivre africain, épice de bien moindre valeur que le poivre indien.

Dom Joâo, deuxième du nom, poursuivit l’œuvre du périple africain avec le même zèle que le prince Henri. Diôgo Câo, franchissant la ligne de l’équateur, atteignit d’abord un très grand fleuve, auquel il donna le nom de rio do Padrâo ou « rivière du Pilier », à cause de la construction qu’il éleva sur une pointe de l’embouchure, en témoignage de sa prise de possession : ce puissant cours d’eau, que le seul courant des Amazones dépasse en abondance, est le Zaïre ou Congo, dont les Portugais occupèrent bientôt les terres riveraines. Avant de s’en retourner en Portugal, Diogo Câo poussa le long de la côte jusqu’au vingt-deuxième degré de latitude méridionale, où il laissa un autre pilier d’attente (1485).

Son successeur dans l’œuvre de circumnavigation africaine, Bartholomeu Diaz, dressa de nouveaux jalons sur le rivage africain, jusqu’à la baie de Santa Elena (Saint-Helens), non loin de la pointe terminale de l’Afrique, mais, ayant été saisi par les tempêtes, il fut poussé loin des côtes jusqu’en des parages où des vagues « plus hautes et plus froides qu’ailleurs », se déroulaient avec majesté dans la direction de l’Est. Les navigateurs comprirent que le continent était dépassé : ils cinglèrent d’abord à l’est, puis au nord, et lorsqu’ils atteignirent la côte de l’Afrique, là où s’ouvre la baie dite actuellement d’Algoa, ils constatèrent que le littoral gardait une direction orientale avec inflexion vers le nord (1487). Le problème était résolu et les navigateurs pouvaient retourner dans leur patrie. Pourtant Bartholomeu Diaz obtint de ses compagnons de suivre encore pendant trois jours le littoral africain, il parvint jusqu’à l’embouchure du rio De Infante, appelé depuis Great Fish River, et vit la côte se perdre dans la direction du nord-est ; quand il fut de retour devant le pilier qu’ils avaient érigé sur la baie d’Algoa, il l’entoura de ses bras « comme un fils », nous dit Barros dans ses Dérades. Le voyage vers les Indes Orientales ne devait être poursuivi que dix années après et, dans l’intervalle, une autre découverte plus considérable