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Page:Reclus - L'Homme et la Terre, tome IV, Librairie universelle, 1905.djvu/279

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partage de l’amérique méridionale

de son voisin plus favorisé. Aussi les discussions diplomatiques commencèrent-elles aussitôt après le retour de Colomb de son premier voyage.

Déjà le prince Henri s’était fait octroyer au milieu du quinzième siècle une bulle papale donnant au Portugal la possession des terres qu’il pourrait découvrir au delà du cap Bojador « même jusqu’aux Indes ». Cette concession laissait donc prise au doute, puisque les Espagnols, revendiquant les terres occidentales, y voyaient aussi les escales des Indes. Tout d’abord on fît une convention d’attente, puis, en 1494, on rédigea le traité de Tordesillas[1] par lequel les Portugais, qui d’abord n’avaient obtenu pour ligne divisoire du monde, entre eux et les Espagnols, qu’un méridien passant à « cent lieues » à l’ouest des Açores, firent reporter cette limite de partage à 270 lieues du même archipel. Un cardinal de la cour d’Alexandre VI s’était chargé d’entériner ecclésiastiquement l’accord des deux puissances[2] ; mais il ne faut point voir dans la signature papale un acte de souveraineté hautaine à la Hildebrand, comme si le souverain pontife s’était arrogé le droit de couper le monde en deux à la façon d’une pomme[3] ; en réalité, la force respective des deux puissances contractantes détermina seule le tracé de la ligne de démarcation : le premier méridien de limite, qui n’aurait donné au Portugal que le musoir extrême du Brésil, ayant soulevé à Lisbonne une tempête de récriminations, l’Espagne se résigna à l’acceptation du traité de Tordesillas[4] ; on sait que, dans le cours de l’histoire, le Portugal ne s’en contenta point, puisque la frontière du Brésil a été reportée à plus de 2 000 kilomètres plus loin dans l’intérieur.

En l’année 1501, un autre voyage eut lieu le long des côtes du Brésil, moins important que celui de Cabral, au point de vue politique, mais peut-être plus sérieux en résultats, puisqu’il fit mieux connaître le Nouveau Monde : ce fut le voyage d’Amerigo Vespucci qui, pilotant une flottille portugaise, étudia d’escale en escale le littoral brésilien, du port de Bahia à la baie de Cananea vers le 25e degré de latitude méridionale, puis, cinglant vers le sud-est, aurait parcouru l’Atlantique austral jusqu’à une terre froide, aride, rocheuse, que l’on croit être la Nouvelle-Géorgie. L’expédition fut donc celle de toutes qui, dans la

  1. Tordesillas manque sur la carte n° 358 ; cette ville se trouve sur le Duro, à quelques kilomètres en aval de Valladolid.
  2. Ernest Nys.
  3. Oscar Peschel, Zeitalter der Entdeckungen.
  4. Oldham, Scottish Géographical Magazine, March 1893. — Voir la ligne de démarcation sur la gravure de la page 249.