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Page:Reclus - L'Homme et la Terre, tome IV, Librairie universelle, 1905.djvu/72

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l’homme et la terre. — les communes

et dans le monde urbain, que, sur des centaines de points, se firent des tentatives, heureuses ou malheureuses, pour le groupement, de défense commune et d’entr’aide chez les paysans et chez les bourgeois. A la fin du onzième siècle, et pendant le cours du
Cabinet d’Estampes.
intérieur d’une halle au xve siècle
Miniature reproduite par le bibliophile Jacob Lacroix.
Le Moyen Age et la Renaissance.
douzième, le mouvement d’émancipation prit un caractère si intense, si rapide qu’on a pu le comparer à une sorte d’explosion. C’est que de tout temps et sans qu’il soit nécessaire de chercher l’existence de souvenirs ataviques, les hommes se sont unis spontanément en « conjurations », en « guildes », en « syndicats », en « fréries », de quelque nom qu’on veuille désigner les alliances entre individus qui souffrent des mêmes maux et cherchent à se libérer de l’oppression. Suivant les occasions et les milieux, le résultat des efforts varia singulièrement, et les combinaisons les plus diverses en furent la conséquence ; mais nulle part, il faut le dire, un groupe quelconque n’acquit son indépendance complète, sans aucun lien de vasselage, sans attache ou tradition par laquelle les anciens maîtres, leurs héritiers ou rivaux, ne pussent asservir à nouveau les affranchis.

En dehors des villes du Midi, le premier exemple d’une révolution communaliste en France est celui du Mans, dont les artisans, fort nombreux, essayèrent, dès 1069, de s’unir en commune avec les villages et châteaux environnants[1]. Mais la nouvelle association entrait en conflit avec un trop puissant suzerain, Guillaume le Conquérant, pour que son entreprise pût réussir : la ville dut se contenter de la confirmation bienveillante de « ses anciennes libertés et justices ». Dans le nord de la

  1. A. Luchaire, Les Premiers Capétiens. Histoire de France d’Ernest Lavisse, tome II. 2e Partie., p. 348.