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Page:Reclus - L’Homme et la Terre, tome 1, Librairie Universelle, 1905.djvu/372

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l’homme et la terre. — iranie

d’abord des recherches premières les deux continents du Nouveau Monde, découverts tardivement, ainsi que l’Afrique continentale, où tant de peuples sont restés sans cohésion, et les îles de l’Océanie, dispersées au loin sur un espace illimité. Il convient évidemment de procéder en premier lieu à l’étude d’une partie de l’Ancien Monde qui est doublement centrale, à la fois par la géographie et par l’histoire. Or, cette région est incontestablement celle qui embrasse à la fois les Pamir, c’est-à-dire le grand massif de diramation des montagnes et des eaux, et les plaines de la Mésopotamie, où le Tigre et l’Euphrate se joignent, s’entre-croisent, se vivifient de leurs courants et de leurs civilisations diverses.

Ces deux foyers géographiques, si distincts par la fonction, forment le contraste majeur dans la région intermédiaire de l’Orient à l’Occident, et l’Iranie en est le lieu de passage et de jonction naturel. Pour le relief, le rayonnement des eaux, le mouvement des airs, les phénomènes du climat, les Pamir du grand plateau et les massifs qui s’y appuient constituent d’une façon évidente la clef de voûte de l’architecture continentale. Mais ce point, mathématiquement central, étant par nature hostile à l’homme, les peuples en marche et les voyageurs sont obligés de faire de grands détours pour l’éviter, tandis qu’à l’ouest, l’autre centre, auquel on peut donner le nom de « potamien  » à cause de ses deux fleuves, fut un rendez-vous des nations et un foyer majeur de civilisation. Ainsi deux unités géographiques s’affrontant en contraste absolu se sont différenciées dans l’Asie occidentale : le premier est devenu pour l’homme un « pôle négatif », suivant l’expression d’Elie de Beaumont appliquée à l’Auvergne et aux terres Centrales de la France[1] ; l’autre, arrosée diamétralement par le Tigre et l’Euphrate, est au contraire le « pôle positif », un lieu d’appel et de vie, le véritable cœur de tout le groupe continental.

Cette contrée de l’Asie Antérieure, qui se rattache par le pédoncule étroit de la Perse du nord, le long de l’Elburz et du Caucase des Turkmènes, à tous les chemins de l’asie orientale passant au nord et au sud des Pamir, est à la fois région continentale et région maritime par exellence. En effet, elle occupe presque le milieu géométrique de l’Ancien Monde, et c’est à des milliers de kilomètres que

  1. Introduction à la Carte géologique.