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Page:Reinach - Histoire de la Révolution russe.djvu/17

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histoire de la révolution russe

un foyer de réaction. Le ministre de l’Intérieur, Goremykine, repoussa péremptoirement ces demandes, sur quoi la Douma déclara que le ministre n’avait pas sa confiance (26 mai). La responsabilité ministérielle n’étant pas inscrite dans la Constitution, il y avait là comme un essai de l’y introduire. Peu de semaines après (21 juillet), l’assemblée était dissoute par ukase et Stolypine remplaçait Goremykine. Alors les cadets, se rappelant le serment du Jeu de Paume — toute la Révolution russe s’est inspirée de la Révolution française — se réunirent à Viborg, en Finlande, et publièrent, au nombre de cent quatre-vingt-un, un manifeste, déclarant que la Constitution était violée, exhortant le peuple à refuser les impôts et le service militaire (22 juillet). Le Gouvernement répondit en sévissant contre les signataires du manifeste et en instituant des cours martiales mobiles pour réprimer les tentatives de rébellion. Désormais, ce fut le règne de la police secrète, privant les citoyens de leurs droits les plus élémentaires, faisant peser sur la presse un régime monstrueux de confiscations et d’amendes arbitraires, annulant toutes les concessions faites en 1905 par la déclaration de l’état de siège et les diverses variétés du « régime d’exception ».

La première Douma, la « Douma de la colère nationale », comme on l’appela, avait réuni l’élite de la société russe intellectuelle — le savoir, le caractère, le talent. Elle ne dura que soixante-douze jours, Un an après, deux députés avaient été assassinés par les Cents Noirs, trois avaient été déportés « administrativement », huit avaient reçu défense de retourner dans leurs circonscriptions, six étaient en exil, un avait disparu.