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Page:Relation historique de la peste de Marseille en 1720, 1721.djvu/160

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Relation Hiſtorique


que pour les faire recommencer pour toûjours.

Dans ces familles ainſi déſolées, tantôt c’eſt une mere, qui reſte ſeule avec ſon petit enfant, tous deux malades. Si cette mere infortunée pouvoit faire au moins comme autrefois Agar, qui chaſſée de la maiſon d’Abraham ſon Maître, laiſſa ſon fils au pied d’un arbre, & s’éloigna dans le déſert, pour s’épargner le chagrin de le voir mourir ; mais celle-ci détenuë par les langueurs de la maladie, ne peut éviter une de ces cruelles extrêmités, ou de mourir, en laiſſant ſon fils dans l’abandon & dans la neceſſité de perir après elle faute de nourriture ; ou de le voir expirer le premier ſous ſes yeux. Tantôt c’eſt une jeune fille, qui a ſurvêcu à tous les autres : avant ces malheurs, un grand nombre de freres ne lui laiſſoient eſperer qu’une mediocre part de l’heritage de leur pere ; la voilà ſeule heritiere d’une maiſon & d’un bien, dont elle eſt embarraſſée ; peu ſenſible à tous ces avantages, elle ne l’eſt qu’à la perte de ceux qui les lui ont laiſſés ; ſeule elle ne ſçait