le bordées des deux côtés de morts à
demi pourris, ſi remplies de hardes
& de meubles peſtiferés jettés par les
fenêtres, que nous ne ſçavions où
mettre les pieds. Toutes les Places
publiques, toutes les portes des Egliſes
traverſées de Cadavres entaſſés,
& en plus d’un endroit mangés par
les Chiens, ſans qu’il fût poſſible,
pendant un nombre très-conſiderable
de jours, de leur procurer la ſepulture.
Nous avons vû dans le même
tems une infinité de malades devenus
un objet d’horreur & d’effroi,
pour les perſonnes même à qui la nature
devoit inſpirer pour eux les ſentimens
les plus tendres & les plus reſpectueux,
abandonnés de tout ce
qu’ils avoient de plus proche, jettés
inhumainement hors de leurs propres
maiſons, placés ſans aucun ſecours
dans les ruës parmi les morts, dont la
vûë & la puanteur étoient intolerables.
Combien de fois, dans nôtre
très-amere douleur, avons-nous vû
ces moribonds tendre vers nous leurs
mains tremblantes, pour nous témoigner
leur joie de nous revoir encore
une fois avant que de mourir, &
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de la peſte de Marſeille
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