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Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/242

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repris possession d’elle-même et qu’elle reconnut de nouveau ceux qui l’entouraient, elle les rassura d’un geste, puis tout à coup ses yeux se fixèrent souriants sur la porte de sa chambre qu’on venait d’ouvrir doucement. L’ex-comtesse Barineff ainsi que Mme Daubrel se retournèrent.

C’était Dumesnil qui entrait.

En reconnaissant son ancien amant, quoiqu’elle ne l’eût pas vu depuis plus de vingt ans, la générale ne put retenir un mouvement de surprise. Elle ignorait complètement les relations d’amitié existant entre sa fille et le vieux comédien.

L’excellent homme ne parut pas, lui, reconnaître Madeleine Froment. Tout entier à sa chère malade dont les regards l’appelaient, il s’approcha d’elle, se pencha pour l’embrasser avec tendresse, et, seulement ensuite, il salua froidement Mme Podoï, à laquelle Lise disait d’une voix éteinte :

— Encore un ami, ma mère, qu’il vous faudra bien aimer comme vous aimerez Marthe. Son dévouement pour moi a été sans limites ; je serais sa fille qu’il ne m’aurait pas mieux soignée. Elle et lui, depuis six mois, ils ont été toute ma famille. Mais j’y pense : vous n’êtes pas étrangers l’un à l’autre. Oui, Dumesnil me l’a dit jadis, alors que j’étais heureuse : il m’a connue toute petite. Il paraît que j’étais jolie et qu’il était fou de moi ! Que tout cela est loin de nous ! Plus tard, j’ai été belle, bien belle ! Et cela, maintenant !

C’en était trop pour ces deux cœurs brisés, et leur douleur si longtemps contenue allait se traduire par les sanglots, lorsqu’on annonça le médecin qui venait chaque jour voir Mme Meyrin, bien qu’il la jugeât perdue.

Pendant que le docteur, par acquit de conscience, examinait sa cliente et tentait de la rassurer à l’aide de quelques généreux mensonges professionnels, les autres acteurs de cette scène pénible gardaient le silence. Quand le praticien sortit, la mère de Lise et Dumesnil le suivirent.