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Page:René de Pont-Jest - Le Cas du docteur Plemen.djvu/11

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culpabilité de cette femme ne troubla pas plus le médecin légiste que les magistrats qui l’avaient condamnée.

Le docteur que le parquet s’était adjoint démontra par a + b, dans un savant rapport, qu’il s’était trouvé, dans le cas dont il s’agissait, en présence d’une grossesse double, de deux conceptions indépendantes l’une de l’autre, ayant des dates différentes, ce qu’on appelle une superfétation, phénomène qui n’était pas sans précédent. C’était dire une énormité, car si le fait s’est présenté çà et là, chez les animaux, en particulier dans la race chevaline, il n’est pas reconnu comme vérité incontestable dans la race humaine, et sans entrer ici dans des développements qui nous conduiraient trop loin, les physiologistes n’admettent la superfétation que dans des conditions particulières que n’avait pas offertes la femme en cause. De plus, il était permis de n’avoir qu’une confiance limitée dans l’expérience du docteur auquel cette malheureuse avait eu affaire, puisqu’en constatant son récent accouchement il ne s’était pas aperçu qu’elle était enceinte de cinq mois. On le voit, l’accusée aurait dû tout au moins bénéficier du doute. Mais que serait devenue l’infaillibilité de la médecine légale et de la justice ? Et la condamnation fut bel et bien maintenue.

Le bureau des grâces daigna seulement abréger la peine de la victime de cette monstrueuse erreur.