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Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/271

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vous raconter la scène que nous avions là sous les yeux. Il ne me faut rien moins que la promesse que je me suis faite de tout vous dire pour m’y décider.

L’homme, un Malais cuivré, à l’œil blanc chargé d’éclairs, aux mouvements souples et agiles comme ceux d’un tigre, était complètement nu ; ses contorsions et ses gestes n’étaient que des invitations au plaisir. Parfois, il suppliait en rampant jusqu’aux pieds de sa danseuse, parfois il se dressait, au contraire, furieux et menaçant.

La femme avait conservé un pagne d’une étoffe légère et diaphane dont elle se servait avec coquetterie, tantôt s’en enveloppant entièrement, tantôt le laissant tomber jusqu’à ses pieds ornés aux chevilles de larges anneaux d’argent.

C’était une toute jeune fille de quatorze à quinze ans peut-être, mais formée ou plutôt déformée comme le sont souvent à cet âge déjà les femmes des régions tropicales. Ses bras étaient ornés comme ses jambes de larges et épais cercles d’argent qui ne représentaient pas autre chose que ses conquêtes nombreuses. À chaque mouvement qu’elle faisait, ils sonnaient comme pour se joindre aux instruments. À ses oreilles et à son nez pendaient de grands et fort disgracieux anneaux d’or. Ses lèvres rouges, qu’elle entr’ouvrait parfois pour sourire de ses dents noires comme de l’ébène, nous disaient assez le fréquent usage qu’elle devait faire du bétel. Ses cheveux assez courts tombaient librement sur ses épaules lustrées par