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Page:René de Pont-Jest - Le Procès des Thugs.djvu/379

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çant qu’il lui avait donné pour le lendemain matin, Mary était décidée à ne lui rien cacher de ce secret qui, d’ailleurs, depuis longtemps déjà, pesait sur sa conscience comme un remords.

Ce qu’elle espérait seulement, c’est que James ignorait le nom de son amant. Elle était résolue à ne pas le lui dire, du moins jusqu’à ce que celui-ci fût prêt à tenir ses promesses, promesses auxquelles la pauvre enfant croyait encore de toute son âme.

On comprend que Mary dormit quelques instants à peine.

Le lendemain, au point du jour, elle se glissa hors de son lit sans que sa mère s’éveillât.

Elle était déjà dans la salle basse, lorsque James y descendit.

— Sœur, dit le jeune ouvrier en lui prenant les mains dans les siennes, après quelques minutes de silence comme s’il eût voulu faire provision de courage et de calme en contemplant le front si pur de la jeune fille ; sœur, hier, quand je suis arrivé, tu étais à ta fenêtre.

— C’est vrai, James, répondit-elle toute tremblante.

— Un homme était en bas, dans la rue. Le savais-tu, était-il là pour toi ?

— Oui, frère, c’est moi qui l’ai prié de s’éloigner lorsque j’ai reconnu ton pas.

— En effet, il s’est sauvé si vite que je n’ai pu le rejoindre. Que te disait-il ?

— James ! supplia Mary.

— Qu’il t’aimait ? continua celui-ci, qui, malgré ses soupçons, avait voulu espérer jusqu’au dernier moment qu’il s’était trompé. Eh bien ! cet homme mentait !

— Comment le sais-tu, James ? tu ne le connais pas, fit doucement l’enfant.

— Si, je le connais, car voici ce qu’il a laissé tomber en se sauvant.

Il tendit à sa sœur le carnet d’Edgar Berney.

Mary étouffa un cri de douleur et d’effroi.

— Écoute, petite sœur, reprit James après un instant de silence et en s’efforçant de paraître calme malgré ses tortures ; sois franche avec moi, qui remplace ici notre père. Je ne te demande pas comment tu as fait la connaissance de ce misérable, mais ce que je veux que tu me jures au nom de Dieu qui nous entend, c’est que cet homme n’a jamais mis les pieds ici, que tu ne t’es jamais trouvée seule avec lui.

— James, James, pardon ! dit Mary en courbant la tête et en se voilant le front dans les deux mains.

— Malheureuse ! s’écria l’ouvrier avec un geste de menace ; la perte de Sarah Thompson ne t’a donc pas servi de leçon ? tu veux donc finir comme elle ?