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Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/323

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Éva répondit à cette boutade par un sourire, mais si triste que Bernel en fut frappé. Il comprit que chez elle l’âme et le cerveau étaient aussi malades que le corps et non moins difficiles à guérir. Il poursuivit cependant, sans rien laisser voir de l’impression qu’il venait d’éprouver :

— En attendant, ayez le courage d’espérer franchement, car vous ne serez pas toujours maîtresse de vous-même, sans compter que tous ces efforts de dissimulation vous épuisent. De plus, quand Gilbert s’apercevra de l’état de votre esprit, il en sera fort affecté, perdra le goût du travail qui le distrait, redoutera, lui aussi, un avenir sans issue, sans retour de bonheur, et il deviendra malade à son tour.

— Oh ! il ne faut pas cela, docteur, il ne le faut pas ! Oui, vous avez raison, je veux être forte. Désormais vous serez content de moi. Mon pauvre ami ! J’avais rêvé cependant de le rendre si complètement heureux, et cela toujours, toujours jusqu’à la dernière seconde de ma vie !

— C’est ce serment-là qu’il faut tenir, si longtemps qu’il doive vous enchaîner encore !

Et serrant les petites mains déjà un peu amaigries que la jeune femme lui tendait, Raymond l’embrassa sur les deux joues ; puis il courut à la rencontre de Ronçay, qu’il voyait arriver à travers le jardin, et il lui dit, sans attendre d’être interrogé :

— Décidément, Mlle de Tiessant va mieux ; nous venons de bavarder pendant près d’une heure ; elle commence à devenir plus sage. Je crois que je