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Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/46

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Là, Mme Daltès se dirigea seule vers l’escalier qui menait au premier étage, le gravit sans aide ; mais au moment d’entrer dans son appartement, elle s’arrêta, semblant hésiter à en franchir le seuil.

Ronçay la prit doucement par la taille, et, l’entraînant dans le salon, il lui dit, en la serrant dans ses bras :

— Tu es heureuse maintenant, mon adorée ; mais ne vas-tu pas m’aimer moins ?

Et comme, en prononçant ces mots, ses lèvres avides cherchaient les lèvres d’Éva, celle-ci détourna la tête et, tentant d’échapper à l’étreinte passionnée qui l’enlaçait, elle supplia :

— Non, plus ainsi, plus jamais ainsi, je t’en conjure !

L’amant pensa, durant une seconde, qu’il avait mal entendu. Non, sa maîtresse, sa femme bien-aimée ne pouvait lui parler de la sorte. Il la força à le regarder en face, mais sa physionomie extatique lui en dit plus encore que ses paroles. Subitement, il comprit.

Alors, la repoussant presque avec brutalité, se sentant devenir fou, il s’enfuit, titubant comme un homme ivre, et, arrivé chez lui, il s’écria avec un horrible accent de désespoir, prêt à blasphémer :

— Ah ! ce que je craignais, ce que je craignais ! L’Église me l’a volée avant même que la mort vienne me la prendre pour toujours !

Au même instant, Éva tombait à genoux et murmurait, les mains jointes et les yeux levés sur le Christ qui était au chevet de son lit :