Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/334

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bait de son char ; quelquefois, cependant, il se faisait battre exprès, pour que l’on crût qu’il jouait de franc jeu[1]. En Italie, nous l’avons déjà dit, il était humilié de ne devoir ses succès qu’à une bande de claqueurs, savamment organisés et chèrement payés, qui le suivait partout. Les Romains lui devenaient insupportables ; il les traitait de rustres, disait qu’un artiste qui se respecte ne peut avoir en vue que les Grecs.

Le départ tant désiré eut lieu en novembre 66. Néron était depuis quelques jours en Achaïe, quand la nouvelle de la défaite de Cestius lui parvint. Il comprit que cette guerre demandait un capitaine d’expérience et de valeur ; mais il y voulait par-dessus tout quelqu’un qu’il ne craignît pas. Ces conditions semblèrent se trouver réunies dans Titus Flavius Vespasianus, militaire sérieux, âgé de soixante ans, qui avait toujours eu beaucoup de bonheur et à qui sa naissance obscure ne pouvait inspirer de grands desseins. Vespasien était en ce moment dans la disgrâce de Néron, parce qu’il ne témoignait pas assez admirer sa belle voix ; quand on vint lui annoncer qu’il avait le commandement de l’expédition de Palestine, il crut un moment qu’il s’agissait d’un arrêt de mort.

  1. Dion Cassius, LXIII, 1, 8 et suiv. ; Suétone, Néron, 21-24, 53.