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Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/132

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qu'il fut porté par les anges dans le sein d’Abraham. Le riche mourut aussi et fut enterré. Et du fond de l’enfer, pendant qu’il était dans les tourments, il leva les yeux, et vit de loin Abraham, et Lazare dans son sein. Et s’écriant, il dit : « Père Abraham, aie pitié de moi, et envoie Lazare, afin qu’il trempe dans l’eau le bout de son doigt et qu’il me rafraîchisse la langue, car je souffre cruellement dans cette flamme. » Mais Abraham lui dit : « Mon fils, songe que tu as eu ta part de bien pendant la vie, et Lazare sa part de mal. Maintenant, il est consolé, et tu es dans les tourments. » Quoi de plus juste ? Plus tard, on appela cela la parabole du « mauvais riche. » Mais c’est purement et simplement la parabole du « riche. » Il est en enfer parce qu’il est riche, parce qu’il ne donne pas son bien aux pauvres, parce qu’il dîne bien, tandis que d’autres à sa porte dînent mal. Enfin, dans un moment où, moins exagéré, Jésus ne présente l’obligation de vendre ses biens et de les donner aux pauvres que comme un conseil de perfection, il fait encore cette déclaration terrible : « Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu. »

Un sentiment d’une admirable profondeur domina en tout ceci Jésus, ainsi que la bande de joyeux enfants qui l’accompagnaient, et fit de lui pour l’éternité le vrai créateur de la paix de l’âme, le grand consolateur de la