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Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/145

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que la louange qui sort de jeunes lèvres est la plus agréable à Dieu.

Il ne perdait aucune occasion de répéter que les petits sont des êtres sacrés, que le royaume de Dieu appartient aux enfants, qu’il faut devenir enfant pour y entrer, qu’on doit le recevoir en enfant, que le Père céleste cache ses secrets aux sages et les révèle aux petits. L’idée de ses disciples se confond presque pour lui avec celle d’enfants. Un jour qu’ils avaient entre eux une de ces querelles de préséance qui n’étaient point rares, Jésus prit un enfant, le mit au milieu d’eux, et leur dit : « Voilà le plus grand ; celui qui est humble comme ce petit est le plus grand dans le royaume du ciel. »

C’était l’enfance, en effet, dans sa divine spontanéité, dans ses naïfs éblouissements de joie, qui prenait possession de la terre. Tous croyaient à chaque instant que le royaume tant désiré allait poindre. Chacun s’y voyait déjà assis sur un trône à côté du maître. On s’y partageait les places ; on cherchait à supputer les jours. Cela s’appelait la « bonne nouvelle ; » la doctrine n’avait pas d’autre nom. Un vieux mot, paradis, que l’hébreu, comme toutes les langues de l’Orient, avait emprunté à la Perse, et qui désigna d’abord les parcs des rois achéménides, résumait le rêve de tous : un jardin délicieux où l’on continuerait à jamais la vie charmante que l’on menait ici-bas. Combien dura cet eni-