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Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/271

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de la dernière heure ; quand aucune d’elles ne se présentait, on l’achetait sur les fonds de la caisse publique. Jésus, après avoir effleuré le vase du bout des lèvres, refusa de boire. Ce triste soulagement des condamnés vulgaires n’allait pas à sa haute nature. Il préféra quitter la vie dans la parfaite clarté de son esprit, et attendre avec une pleine conscience la mort qu’il avait voulue et appelée. On le dépouilla alors de ses vêtements, et on l’attacha à la croix. La croix se composait de deux poutres liées en forme de T. Elle était peu élevée, si bien que les pieds du condamné touchaient presque à terre. On commençait par la dresser ; puis on y attachait le patient, en lui enfonçant des clous dans les mains ; les pieds étaient souvent cloués, quelquefois seulement liés avec des cordes. Un billot de bois, sorte d’antenne, était attaché au fût de la croix, vers le milieu, et passait entre les jambes du condamné, qui s’appuyait dessus. Sans cela, les mains se fussent déchirées et le corps se fût affaissé. D’autres fois, une tablette horizontale était fixée à la hauteur des pieds et les soutenait.

Jésus savoura ces horreurs dans toute leur atrocité. Une soif brûlante, l’une des tortures du crucifiement, le dévorait. Il demanda à boire. Il y avait près de là un vase plein de la boisson ordinaire des soldats romains, mélange de vinaigre et d’eau appelé posca. Les soldats devaient porter avec eux leur posca dans toutes les