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Page:Renan - La Vie de Jésus.djvu/30

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tradition orale. Comme on croyait encore le monde près de finir, on se souciait peu de composer des livres pour l’avenir ; il s’agissait seulement de garder en son cœur l’image vive de celui qu’on espérait bientôt revoir dans les nues. De là le peu d’autorité dont jouissent durant cent cinquante ans les textes évangéliques. On ne se faisait nul scrupule d’y insérer des additions, de les combiner diversement, de les compléter les uns par les autres. Le pauvre homme qui n’a qu’un livre veut qu’il contienne tout ce qui lui va au cœur. On se prêtait ces petits livrets ; chacun transcrivait à la marge de son exemplaire les mots, les paraboles qu’il trouvait ailleurs et qui le touchaient. La plus belle chose du monde est ainsi sortie d’une élaboration obscure et complètement populaire. Aucune rédaction n’avait de valeur absolue. Justin, qui fait souvent appel à ce qu’il nomme « les mémoires des apôtres, » avait sous les yeux un état des documents évangéliques assez différent de celui que nous avons ; en tous cas, il ne se donne