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Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/114

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fées, et je les aimais. Ne riez pas de nous autres Celtes. Nous ne ferons pas de Parthénon, le marbre nous manque ; mais nous savons prendre à poignée le cœur et l’âme ; nous avons des coups de stylet qui n’appartiennent qu’à nous ; nous plongeons les mains dans les entrailles de l’homme, et, comme les sorcières de Macbeth, nous les en retirons pleines des secrets de l’infini. La grande profondeur de notre art est de savoir faire de notre maladie un charme. Cette race a au cœur une éternelle source de folie. Le « royaume de féerie », le plus beau qui soit en terre, est son domaine. Seule, elle sait remplir les bizarres conditions que la fée Gloriande impose à qui veut y entrer. Le cor qui ne résonne que touché par des lèvres pures, le hanap magique qui n’est plein que pour l’amant fidèle, n’appartiennent vraiment qu’à nous.

La religion est la forme sous laquelle les races celtiques dissimulent leur soif d’idéal ; mais l’on se trompe tout à fait quand on croit que la religion est pour elles une chaîne, un