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Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/212

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d’un sentiment tendre et tout humides de regrets. Nos lettres, selon l’usage des maisons religieuses, étaient lues par un des directeurs. Celui qui était chargé de ce soin fut frappé de l’accent d’amour profond qui était dans ces pages d’enfant. Il communiqua une de mes lettres à M. Dupanloup, qui en fut tout à fait étonné.

Le plus beau trait de caractère de M. Dupanloup était l’amour qu’il avait pour sa mère. Quoique sa naissance fût, par un côté, la plus grande difficulté de sa vie, il honorait sa mère d’un vrai culte. Cette vieille dame demeurait à côté de lui ; nous ne la voyions jamais ; nous savions cependant que, tous les jours, il passait quelque temps avec elle. Il disait souvent que la valeur des hommes est en proportion du respect qu’ils ont eu pour leur mère. Il nous donnait à cet égard des règles excellentes, que j’avais du reste toujours pratiquées, comme de ne jamais tutoyer sa mère et de ne jamais finir une lettre à elle adressée sans y mettre le mot respect. Par là, il y eut entre nous une vraie étincelle de com-